Dans cet essai philosophique articulant une corrélation entre conscience noire universelle, métaphysique, histoire et géopolitique d'un côté, et une dichotomie entre traditionalisme et progressisme de l'autre, Kemi Seba trace le chemin d'une pensée critique permettant à l'homme et à la femme noirs, qu'ils soient d'Afrique, des Caraïbes, d'Asie, du Proche ou du Moyen-Orient, d'Amérique ou d'Océanie, de trouver en eux-mêmes les clefs de leur survie, dans un monde dominé, temporairement, par l'occidentale suprématie.
L'Histoire se souviendra que l'année 2017 fut celle d'un début de contestation sans précédent depuis la période des indépendances dans les pays d'Afrique de la zone Franc. Le motif de ces mobilisations ? La dénonciation de la Françafrique, terme générique servant à définir le néocolonialisme effectué par l'oligarchie française qui prévaut encore en Afrique au 21e siècle. Ce dernier se matérialisant par les bases militaires françaises présentes sur la terre Mère, l'utilisation du Franc CFA qui appauvrit le continent africain, enrichit les tenants du système néo-libéral hexagonal, et surtout, la collaboration des réseaux occultes de l'Élysée avec les pires sanguinaires autocrates du continent Africain, ces derniers étant bien souvent « placés » à la tête de ces états par l'entremise du prétendu pays des « droits de l'Homme ».
À l'initiative de ces manifestations continentales, un homme qui clive : Kemi Seba. Pour une bonne partie de la jeunesse africaine et caribéenne, il est un héros qui a remis de manière médiatique la question de la souveraineté des peuples afros au centre des débats en ce nouveau millénaire. Pour l'intelligentsia africaine (bien souvent formatée idéologiquement par l'Occident), c'est un populiste, un dangereux démagogue qui pousse la jeunesse à l'anarchie, à la haine anti Occident et à la rébellion contre ses élites endogènes. Enfin, pour les autorités françaises, il est actuellement, la plus grosse menace du courant qualifié de souverainiste africain.
Pourquoi ce combat, et jusqu'où ira cette nouvelle génération africaine désabusée et hostile à l'Occident ? Dans ce récit épique écrit dans des conditions périlleuses, Kemi Seba inscrit la lutte contemporaine pour la souveraineté africaine dans les pages de l'Histoire. Une histoire tumultueuse ou géopolitique et résistance locale s'entremêlent pour ne plus être que les deux facettes d'une même pièce face à l'hydre néolibérale.
Terroriste identitaire noir pour l'oligarchie d'Occident, penseur panafricanisme révolutionnaire et médiatique aux yeux des Africains du Continent. Kemi Seba, l'homme qui, depuis plus d'une décennie, bouscule intellectuellement le courant militant panafricain francophone, au point qu'il en est devenu l'idéologue actuelle plus audible, mais aussi le plus controversé, nous livre ici sa partition politique et philosophique probablement la plus aboutie, la plus provocatrice, mais surtout, celle qui, pour les générations futures, sera la plus porteuse d'espoirs et de solutions.
Dans un récit au rythme effréné, mêlant le phrasé de la rue à un style littéraire des plus soutenus, Seba analyse son retour en Afrique, les difficultés d'adaptation d'une diaspora désabusée par l'Occident, puis l'intégration, sa montée en puissance médiatique, les rapprochements politiques avec les grandes nations résistant au mondialisme, et surtout, la reconnexion avec la pérenne tradition, qui n'est rien d'autre que la clef de protection face à la mondialiste invasion.
Une pérenne tradition qui s'inscrit comme la contre-valeur absolue à la norme établie par l'oligarchie, qui a fait de la modernité la référence, et l'opposition à cette dernière la sève du néant, étiqueté par les dominants de « nihilisme ». Seba, dans un exercice de réflexion au laser, rappelle que ce qui constitue le néant des valeurs pour l'impérialisme représente l'harmonie et la sagesse pour d'autres. Ces autres, que le concert des nations a voulu noyer depuis si longtemps. Ces autres, qui, lorsqu'ils se remémoreront qui ils sont, bouleverseront l'ordre établi par le cancer des nations.
Lorsque le 20 avril 2008 de nombreuses personnalités représentant les divers bords de la politique française se sont massées au stade de Dillon en Martinique pour assister aux obsèques d'Aimé Césaire, certaines souhaitaient sans doute secrètement, en enterrant ce poète génial, défenseur de la dignité des Noirs, voir disparaître avec lui le concept de la négritude. Entre autres politiciens présents, D. de Villepin, L. Fabius, B. Kouchner, F. Hollande, N. Sarkozy, F. Bayrou..
Pourtant, à la même période, ces mêmes politiciens français participaient à l'interdiction successive de trois organisations d'un polémiste identitaire noir, qui, à travers ses discours politiques en direction des déshérités et des Noirs en priorité, symbolise selon eux, dans la sphère francophone, un danger pour l'ordre public. S'il semble représenter en effet une menace pour l'oligarchie française - au point que cette dernière l'ait placé dès 2006 sous la surveillance de la section antiterroriste et, à partir de 2008, de la DCRI, il reste plus que jamais un espoir pour la nouvelle génération de panafricains révolutionnaires et de dissidents anti-impérialistes de tous bords, qui voient en lui l'homme ayant repris le flambeau de ses pères, et donné à ses jeunes frères et soeurs de nouveaux repères.
Cet homme a un nom, qui résonne partout où l'on parle de revalorisation de l'homme et de la femme noirs, dans le monde francophone, et au-delà : Kemi Seba. Le plus souvent, ce nom provoque des tensions, avec d'un côté, ceux qui voient en lui le symbole d'une virilité politique nègre retrouvée, et de l'autre, ceux qui déplorent, à travers sa personne, la naissance malheureuse d'un extrémisme noir jusque-là circonscrit aux États-Unis. Mais au-delà de cette polémique médiatique qui entoure Kemi Seba, qui est-il réellement, quel est son message, le sens de son combat ? Est-il vraiment le militant noir raciste que l'on nous présente ? Son concept de négritude est-il le même que celui défendu par ses aînés ? Pourquoi se voit-il, en 2012 encore, interdire d'entrée dans plusieurs pays, au motif que ses discours pourraient constituer des « risques de troubles à l'ordre public » ?
Ce livre donne des réponses et, plus que ça, rappelle le sens du combat de ceux qui ont sublimé la souffrance de la négrophobie pour en faire une chance, celle d'être des hommes et des femmes libres de penser, mais aussime.